LES CRAMÉS DE LA BOBINE

Les Chats persans (journal des débats)

vendredi 18 mars 2011 par Claude

"Les Chats persans", 5ème film de Bahman Ghobadi - prix spécial du jury du festival de Cannes 2009 - nous a été proposé vendredi 11 mars dans le cadre d’une soirée animée par Amnesty International. Cette oeuvre, tournée dans des conditions de clandestinité particulièrement difficiles (dans des caves, des granges, des cafés interlopes ou immeubles en construction) pour échapper à la censure iranienne, est doublement originale.

Elle est d’abord (auto)biographique : le cinéaste, en effet, s’est inspiré de l’expérience de sa propre compagne, sa co-scénariste, Roxana Sabéri, journaliste américano-iranienne, arretée en Iran et accusée d’espionnage. Le hasard a voulu qu’elle soit libérée de prison deux jours avant le début du festival de Cannes - troublante coincidence entre l’art et la vie, comme un affranchissement réciproque...Rappelons que cette histoire de musiciens est également bien réelle : les musiciens, désireux de former un groupe et d’organiser un concert pour financer leur départ, ont du se cacher pour ne pas etre repérés par la police. Deux ou trois motocyclettes seulement ont été utilisées pour les repérages. Une voiture ordinaire a meme été transformée en voiture de police pour la scène de l’arrestation de David !

Par ailleurs, elle choisit, non l’attaque frontale, politique, contre le régime totalitaire d’Ahmadinejab, reconduit à la présidence en 2009 malgré les fraudes électorales massives et la sanction effective des urnes, mais un angle d’attaque plus buissonnier, à travers la musique : la caméra à l’épaule et le montage serré, l’errance des musiciens et des deux héros sortis de prison, le mélange des genres musicaux (rap, rock, heavy metal), tout dans ce film tourné en 17 jours crée une impression de fuite éperdue, de moments volés à la barbe du temps et des...barbus - quoique ce "boeuf permanent, totalement freestyle", selon "Les Inrockuptibles", relève parfois un peu trop du clip étourdissant. On en ressort un peu groggy et, si le propos est sympathique et courageux - le film sera-t-il jamais montré en Iran ? - on aurait aimé voir davantage le fonctionnement du régime, l’intervention de la police, ici indirecte et allusive à travers l’enlèvement d’un chien d’une voiture : en Iran, on n’a pas le droit de sortir avec un chien ou un chat ; la musique est impure pour l’Islam et entendre le chant d’une femme est un péché !!

Reste un message d’espoir : si la répression est féroce dans les dictatures, la soif de liberté est irrépressible - et l’inventivité des opposants ou des jeunes infinie : ateliers de faussaires bien cachés, meme si la police surgit finalement, étable improvisée en salle de répétition au milieu des vaches, boite à oeufs amortissant le bruit de l’infame musique...

L’auteur d’"Un temps pour l’ivresse des chevaux" ou des "Tortues volent aussi" a bien retenu la leçon de Figaro dans la 3ème scène de l’acte V du "Mariage de Figaro" : "ne pouvant avilir l’esprit, on se venge en le maltraitant (...) Il n’y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits."

Claude


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